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Pour une gestion résiliente de l’eau face à l’urbanisation et au climat

22 juin 2020
Cédric
Cédric

Une équipe de chercheurs s’est intéressé à l’état actuel de la demande en eau de la ville de Dacca, au Bangladesh. L’étude montre notamment que la croissance démographique a une grande influence sur l’augmentation de la demande. Il en ressort que la demande en eau augmente de 4% par an en moyenne dans la ville de Dacca depuis 1990 et la nappe phréatique descend à plus de 70 m en raison d’un important prélèvement d’eau. Voici des pistes économiques, sociales et environnementales que cette étude soulève afin d’augmenter la résilience socio-écologique de Dacca mais dont les mégalopoles du monde devraient s’inspirer au vus de la situation climatique.

Situation actuelle

La gestion de la demande, la garantie d’un minimum d’eau pour la consommation quotidienne, la planification des ressources et l’épuisement des eaux souterraines sont une préoccupation commune dans les mégapoles rapidement urbanisées du monde entier et un défi de plus en plus important dans les pays en développement. En 2014, près de 3,9 milliards de personnes, soit 54% de la population mondiale vivaient dans les villes, d’ici 2050, les deux tiers de la population mondiale vivront dans les villes, ce qui générera 55% de demande d’eau supplémentaire dans le monde.

La gestion futur de l’eau sera impossible si les villes du monde ne sont pas en mesure de relever les défis actuels concernant la sécurité de l’eau, la gestion de la demande, la conservation, l’équité, l’efficacité d’extraction et la consommation durable.

Il apparaît que la situation de l’indice de sécurité hydrique urbaine est pire que l’indice de sécurité hydrique des ménages dans toutes les régions du monde. Cela signifie que toutes les régions, en particulier le monde en développement, ont une grande marge de progression quant à la gestion urbaine et domestique de l’eau.

De façon générale, la gestion durable de l’eau traite de la manière dont les pays assurent son utilisation efficace pour soutenir leur croissance économique, la production alimentaire, la consommation des ménages, l’industrie et l’énergie.

Une étude publiée dans Global Ecology and Conservation se concentre sur le cas de la ville de Dacca, au Bangladesh, pour étudier ce problème et fournir un cadre systématique de gestion durable de la demande en eau afin de d’augmenter la résilience socio-écologique. Cet exemple peut donc être inspirant pour d’autres pays possédant de grandes mégalopoles et, notamment, dans le contexte de changement climatique que nous connaissons et qui favorise les périodes de sécheresse et la violence des incendies. Ici, la résilience fait référence à la capacité d’un système socio-écologique d’absorber ou de résister à des perturbations et à d’autres facteurs de stress de telle sorte que le système reste dans le même régime, en maintenant essentiellement sa structure et ses fonctions.

vous trouverez plus d’information au sujet de la résilience dans cet article.

La sécheresse pourrait toucher cet été 58 départements. Le ministère de la Transition écologique veut parer à de possibles « sur-crises » liées au manque d’eau et au Covid. https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/la-secheresse-menace-plus-de-la-moitie-de-la-france-dont-tout-le-grand-est-1203957

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Les leviers d’actions que l’étude soulève

L’étude montre dans un premier temps que la demande en eau augmente (logiquement) avec la démographie. Plus surprenant, plus les stocks augmentent, plus les prix augmentent ainsi que la consommation ce qui mène à une extraction excessive. Le niveau des eaux souterraines est ainsi passé de 28 m en 1997 à 70 m en 2012.

Les auteurs se sont intéressés aux moyens techniques, sociaux et économiques utilisable afin d’accroitre la résilience hydraulique.

 

Approche de gestion durable de la demande en eau:

  • Améliorer l’efficacité technique de production permettrait de diminuer les coûts de fonctionnement et donc d’augmenter les revenus de l’approvisionnement en eau afin de les réinvestir dans l’extraction d’eau de surface et l’équipement de stockage (voir plus bas).

 

  • Augmenter le tarif de l’eau permettrait de réduire sa consommation. En effet le prix actuel de l’eau est inférieur à son coût réel d’approvisionnement ce qui encourage la consommation. Il est cependant évident que l’établissement des prix devrait être différent entre industriels et domestiques. Pour une tarification optimale de l’eau, celle-ci devrait être considérée comme un bien économique. Étant donné que les personnes de toutes les catégories sociales ont le même droit d’accéder à l’eau et d’en bénéficier, le prix de la quantité minimale d’eau requise pour mener la vie quotidienne doit être maintenu au plus bas.

 

  • Les pertes du système peuvent être réduites jusqu’à un certain niveau en augmentant la sensibilisation du public et en améliorant la surveillance et la réglementation. Si l’office de distribution d’eau et d’assainissement de Dacca veut réduire davantage les pertes du système, l’équipement et les pipelines doivent être remplacés, ce qui nécessite plus d’investissement mais permettra de réaliser des économies d’échelle plus importantes à long terme.

Résilience sociale

  • Le principe d’équité doit être appliqué: en général, un problème d’équité survient lorsque les groupes les plus pauvres paient plus par unité d’eau que les autres groupes sociaux. Le groupe à faible revenu, comme les habitants des bidonvilles urbains et d’autres communautés pauvres, n’est pas entièrement couvert par L’office de distribution de l’eau de Dacca et les riches et les pauvres paient le même prix pour l’eau. Ainsi, pour accroitre la résilience sociale, l’accent doit être mis sur l’équité par l’autorité des fournisseurs d’eau et le gouvernement.

 

  • De l’eau pour tous: les personnes riches ont la possibilité d’installer l’équipement pour prélever de l’eau souterraine pour leur consommation, mais les pauvres ne peuvent pas se le permettre et doivent aller chercher une source d’eau insalubre. Ainsi, l‘eau fournie par l’office de Dacca devrait être potable et livrée à tous. Une autre possibilité serait un rationnement équitable pour tous et subvenant aux besoins de chacun.

Environnement

Si la nappe phréatique continue de baisser, un vide sera créé dans l’aquifère ce qui pourrait provoquer un effondrement soudain de la surface. Dans ce cas, pour protéger la couche de sol contre l’effondrement massif et gérer les ressources en eaux souterraines, la consommation devrait être transférée de manière significative des eaux souterraines aux eaux de surface. Un bon nombre de rivières telles que Turag, Balu, Sitalakhya, Buriganga et Dhaleswari entourent la ville de Dacca qui est maintenant fortement contaminée par des déchets, des eaux usées, des effluents de fabrication et des polluants ménagers.

Plus de 300 déversements d’eaux usées domestiques, de déchets d’assainissement et d’effluents industriels polluent les rivières chaque jour et diminuent le stock de ressources en eau de surface de la ville de Dacca. Par conséquent, la pollution de l’eau doit être contrôlée, de façon réactive mais aussi préventive, pour maintenir la durabilité et protéger les précieux plans d’eau et les zones humides.

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Petite re-contextualisation du niveau d’humidité en France.

Conclusion

Dans le contexte actuel, l’épuisement des eaux souterraines, l’empreinte hydrique industrielle et domestique doivent être réduits pour la meilleure gestion possible de l’eau de la ville de Dacca. Une politique intégrée, la coopération entre le fournisseur de services publics et le renforcement public peuvent aider à adopter rapidement une gestion durable de la demande en eau.

Jusqu’à maintenant la France n’a que peu souffert de stress hydrique, ce dernier se faisant sentir en été durant les période de sécheresse. Cependant, sous l’effet du changement climatique, les périodes de sècheresse s’étendent et sont plus fréquentes. Une étude du World Resources Institute montrait l’année dernière qu’à l’horizon 2030, environ 470 millions de personnes seront en proie à un manque d’eau ayant des conséquences sur la santé publique et des troubles sociaux. Cette étude plaçait la France dans la fourchette des pays à risques moyen à élevé, le changement climatique compliquant le renouvellement des stocks. Il est temps de prendre conscience de la valeur de l’eau et réfléchir à des stratégies et des politiques de gestions plus résilientes, notamment dans le contexte d’un monde ou l’économie se contracte et le changement climatique s’intensifie.

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